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GéMagazine n°184 : François-René de Châteaubriand

Juillet-Août 1999

"Né gentilhomme"

La brochure réalisée par Bernard Lebeau "Généalogie de la famille de Chateaubriand" a servi de base à cette étude. L'ascendance de l'écrivain François René de Chateaubriand a été remontée jusqu'à la vingt sixième génération. Les résultats de cette recherche, très complète, est parue à l'occasion du cent cinquantenaire de la mort de l'écrivain, en 1998. Apparenté à Saint-Louis, Le Cid et Chimène par les Visconti, il est aussi le cousin du marquis de Sade, de l'académicien Auguste de Caumont, duc de La Force, et de Charlotte Corday.

 

De Saint-Malo à Saint-Malo: une vie pleine d'oppositions.

C'est à Saint-Malo, en 1768, par "une nuit de tempête" que vint au monde François René de Châteaubriand. Il a tout juste neuf ans lorsque la famille s'installe au château de Combourg. Après des études décousues à Dol, Rennes et Dinan, il prend un brevet de sous-lieutenant en 1786. Présenté au roi à Versailles, il se mêle à la vie dissipée des salons parisiens. Rêvant de contrées inconnues, il s'embarque pour l'Amérique en avril 1791. La nouvelle de l'arrestation de Louis XVI le ramène à Saint-Malo, où il épouse le 21 février 1792 Céleste Buisson de La Vigne, native de Lorient (Morbihan), et fille de Alexis Jacques Buisson de La Vigne et de Céleste Rapion de La Placelière. Son loyalisme breton lui fait rejoindre l'armée des émigrés; blessé à Thionville, il traverse la Belgique et se réfugie à Londres. Rayé de la liste des Emigrés, François René de Châteaubriand rentre en France en mai 1800, et se mêle à la vie littéraire. Il fait ses débuts diplomatiques à Rome comme secrétaire de légation, mais devant la mésentente qui existe avec le cardinal Fesch, oncle de Napoléon alors premier Consul, il démissionne et entreprend des voyages. Il visite alors la Grèce, l'Egypte, la Tunisie et l'Espagne. Elu à l'Académie en 1811, son opposition à l'Empire est à son comble. François René de Châteaubriand rallie Louis XVIII et le suit en Belgique. De retour à Paris, il est nommé Pair de France. On le trouve ensuite Ambassadeur à Berlin, puis à Londres, et ministre des Affaires Etrangères jusqu'en 1824. Il a de nouveau un rôle dans la vie politique, puisqu'il accepte l'ambassade de Rome, une mission à Prague, mais c'est alors la fin de sa carrière politique. Sa vieillesse sera consacrée à la littérature. Octogénaire, il s'éteint en juillet 1848. Sa tombe se dresse près de Saint-Malo, à la pointe du Grand-Bé, face à la mer.

 

Bretagne et Pays de Loire.

Les origines géographiques citées à la cinquième génération donnent une grande part à la région Bretagne puisque près de 88% des individus y ont vu le jour. Les pays de Loire occupent le reliquat. Des origines somme toute très concentrées.

Si François René de Châteaubriand n'a pas eu d'enfant - à l'exception peut-être d'un enfant naturel - il est lui-même issu d'une famille de dix enfants. Son père avait onze frères et soeurs, sa mère, dix. Des familles que l'on peut qualifier de prolifiques.

Quant à l'espérance de vie elle apparaît élevée pour l'époque - tous les décès, il est vrai, n'ont pas été localisés. L'écrivain s'éteindra âgé de 79 ans. L'âge moyen au décès par génération passe de 60 ans à 70 ans de la cinquième à la deuxième génération, avec une pointe à 74 ans à la troisième génération.

 

De Beaufort à Vauregnier.

L'ascendance remonte à Teuharius de Châteaubriant, avec un T et non un D, ancêtre à la vingt sixième génération de l'écrivain. Décèdé avant le 13 juin 1037, son mariage fut célébré avec Innoguent, fille de Hamon 1er, vicomte d'Alet et de Roianteline. La filiation se poursuit ainsi: Brient 1er à la vingt cinquième génération, puis Geoffroy dit le bâtard, Brient II inhumé le 1er décembre 1116 à Béré (Loire-Atlantique), Geoffroy II décédé le 9 septembre 1150, autre Brient, Geoffroy baron de Châteaubriant qui assista aux Etats de Vannes en 1203, autre Geoffroy, autre Geoffroy inhumé le 29 mars 1263 dans l'église de la Trinité de Châteaubriant, autre Geoffroy, baron de Châteaubriant et de Candé mort le 31 octobre 1284, Briant sire de Beaufort qui assista aux Etats tenus à Rennes en 1286, autre Briant sire de Beaufort qui ratifia le traité de Guérande le 25 avril 1381, Bertrand seigneur de Beaufort qui assista au parlement général tenu à Vannes en 1386, Briant seigneur de Beaufort qui fut choisi en 1423 pour amiral de la flotte qui battit les Anglais au siège du Mont-Saint-Michel, Bertand seigneur de Beaufort qui assista aux Etats de 1451, Jean seigneur de Beaufort chambellan de François II en 1459, autre Jean seigneur de Beaufort écuyer du roi Charles VIII et capitaine de Meulan, François seigneur de Beaufort décédé au château du Plessis-Bertrand à Saint-Coulomb le 13 octobre 1562, Briant seigneur de Vauregnier qui fut poursuivi pour le meuretre du premier mari de sa femme, Gilles seigneur de Vauregnier, et Christophe, l'ancêtre n°64 de l'écrivain.

 

Maintenus nobles d'ancienne extraction.

Plusieurs familles dans l'ascendance de l'écrivain ont dû apporter les preuves de leur noblesse dont Christophe de Châteaubriant (n°64), né à Ruca le 1er avril 1597, est décédé à Hénanbihen le 15 décembre 1675. Seigneur de la Guérande et de la Ville-Geslin, il fut maintenu noble d'ancienne extraction de Bretagne le 7 septembre 1669. Il épousa en secondes noces à Hénanbihen le 20 février 1666 Jacqueline Rogon, veuve de Thomas Bosquien. De sa première épouse Jeanne Berthelot, décédée à Hénanbihen le 5 janvier 1664, il eut sept enfants: six filles et un garçon, tous nés à Hénanbihen, à l'exception de Renée qui a vu le jour à Saint-Denoual dans les Côtes-d'Armor.

Mathurin de Bédée (n°24), comte de la Mettrie-martin, seigneur de la Bouëtardaye, etc. fut lui aussi maintenu noble d'ancienne extraction par un arrêt du 16 mars 1668. C'est à la treizième génération que l'on trouve un certain Jehan Bédée, qui eut une descendance: un fils prénommé comme lui, un petit-fils, Robert, un arrière-petit-fils, autre Robert, tous trois qualifiés de "seigneur de Malaunay". A la neuvième génération, Jacques Bédée (n°384) est seigneur de Boisriou. Il commanda avec son fils, Gilles de Bédée (n°192) - qui est alors dit Gilles de Bédée et non Bédée - le château de Guébriant pour le roi. Ce dernier fut assassiné dans une embuscade laissant au moins un fils, Marc Bedée (n°96), que l'on trouve à la tête d'une compagnie de 50 chevau-légers des ordonnances du roi en 1600. Le père de Mathurin de Bédée (n°24), Pierre de Bédée (n°48) né en 1622 et décédé en 1669, chevalier, seigneur de Boisriou, de la Mettrie-Martin et des Bignons, épousa à Bourseul le 6 août 1640 Gillette Gouéon (n°49), native de Langueux dans les Côtes-d'Armor.

François Du Rocher du Quengo (n°18) fut maintenu noble par arrêt. La famille du Rocher remonte à la treizième génération à Guillaume du Rocher, écuyer, qui ratifia le traité de Guérande, à Dinan, en 1381, et dont le fils prénommé Jean fut seigneur du Quengo. Rolland du Rocher, cité à la onzième génération, épousa Béatrix de Guemadeuc qui lui donna au moins un fils.Leur petit-fils, Guillaume du Rocher, fut seigneur du Quengo et de Trevelo. A la huitième génération, Antoine du Rocher (n°144) s'est allié avec Olive de La Motte par contrat signé le 3 septembre 1552; il est dit alors "gentilhomme de la chambre du duc Jean de Bretagne". Le fils de François du Rocher (n°72),fils des précédents,  Louis du Rocher (n°36), fit hommage au roi pour la seigneurie du Quengo qu'il avait héritée de son grand-père, Antoine du Rocher.

Il en fut de même pour Guy Mathurin Lamour de Lanjégu (n°10) maintenu noble d'extraction en Bretagne en 1669, dont l'ascendance est connue à la huitième génération depuis Jean Lamour (n°160), seigneur de la Villeneuve, et de Marguerite du Breuil, en passant à la septième génération par Alain Lamour (n°80) et Jeanne Cojallu, et à la sixième génération, par autre Jean Lamour (n°40) et Françoise de La Morinaye.

 

Les deux branches de la famille de Châteaubriant

François de Châteaubriant (n°152), ancêtre à la huitième génération, seigneur de Beaufort, du Plessis-Bertrand, d'Orange, de Saint-Léger, de la Villebague, de Campfleur et de Tannay, est le père de Georges de Châteaubriant (n°76), ancêtre à la septième génération de l'écrivain, et de Briant de Châteaubriant (n°128), ancêtre à la huitième génération de l'écrivain - à la même génération que son père, François - .

Georges de Châteaubriand (n°76), seigneur de Beaufort, d'Orange et de La Villebague, eut sept enfants de Gabrielle Brullon (n°77): 1° Pierre l'aîné qui apparaît dans l'ascendance de l'écrivain et porte le numéro 38; 2° Guy né à Plerguer le 16 avril 1578; 3° Christophe né au même lieu en 1580, baron de Tanney, et dont la descendance est connue sous le patronyme Tanney; 4° Françoise née en 1581; 5° Claude, seigneur de Texue, dont cinq enfants; 6° François, baron de Beaufort mort en 1662; 7° et Jeanne qui épousa François de La Jouyère.

Pierre de Châteaubriand (n°38) est né le 16 mars 1577 à Plerguer. Seigneur de Beaufort, d'Orange et de la Villebague, il fut fait chevalier de l'ordre du roi. Marié en 1607 avec Françoise de Saint-Gilles (n°39), sa descendance a compté neuf représentants: quatre garçons et cinq filles. Leur troisième enfant à naître fut Marguerite de Châteaubriand (n°19).

Briant de Châteaubriand (n°128), l'ancêtre direct qui a transmis son nom à l'écrivain, est né vers 1550. Seigneur de Vauregnier, marié avec Jacquemine du Boisriou (n°129), dont le premier mari fut tué. L'auteur du meurtre fut identifié; il s'agissait en fait de Briant de Châteaubriant (n°128) qui fut condamné par comtumace à avoir la tête tranchée par arrêt de la cour du 16 juillet 1565. Trois enfants virent le jour: 1° François mort en bas âge; 2° Gilles, ancêtre n°64; et 3° Françoise qui épousa Pierre Loret.

 

Ancêtres huguenots.

L'église protestante de Bretagne  apparaît dans la deuxième moitié du XVIème siècle. Le protestantisme en Bretagne touche des grandes familles, des bourgeois et des artisans. François du Rocher du Quengo (n°18) fut protestant jusqu'en 1667. Gaspard Uzille (n°124), fils de Jean Uzille et de Marie Vaupithen, mort à Guingamp en 1623, qualifié d'écuyer et de docteur en médecine, suivit en Bretagne la duchesse de la Trémoïlle. Il appartenait à la religion réformée et assista au synode de Privas en 1611 avec les représentants bretons huguenots. Son mariage avec Marie Steen (n°125) fut réglé par contrat passé devant maître Esain, notaire à Calais, le 1er septembre 1586.

Leur fils, Jean Uzille (n°62) était écuyer. Seigneur du Coing en Flandre et de Kerlo de la commune de Quintin, il se maria deux fois: 1° avec Hélène du Stangier (n°63), native de Rennes; et en 2° à Marie de Gennes, fille de Jean et de Françoise Doudart.

 

Les parentés célèbres.

L'ancêtre commune de François René de Châteaubriand, de Donatien de Sade et de Auguste de Caumont duc de la Force, est Geoffroy de Châteaubriant (1237-1284) qui épousa Belleassez de Thouars. Geoffroy de Châteaubriant eut deux fils: autre Geoffroy dont descend l'écrivain, et Jean qui eut de son épouse Isabelle de Thouars au moins un fils aussi prénommé Geoffroy et surnommé Brideau, ce dernier ancêtre commun du marquis de Sade et du duc de La Force.

Quant à l'ancêtre commun de l'écrivain et de Marie Anne Charlotte de Corday d'Armont, il s'agit de Guillaume de Farcy qui eut de son épouse Marie Caget au moins un garçon Léonard de Farcy. Celui-ci se maria deux fois: en premières noces avec Anne de Buherre dont descend l'écrivain, et en secondes noces avec Catherine Bizeul dont descend Charlotte Corday. Le petit-fils de Léonard de Farcy issu de son second mariage, Jacques Louis de Farcy épousa Marie de Corneille - descendante de Pierre Corneille, et fait apparaître une parenté par alliance.

C'est par la famille Visdelou que François René de Châteaubriand est apparenté aux représentants des maisons de Bavière, de Belgique, de Bragance, d'Autriche, de naples, de Hohenzollern, d'Orléans et de Saxe, mais aussi aux représentants des maisons de Mecklembourg-Schwerin, de Luxembourg et de Parme.

 

Né gentilhomme.

Le travail très complet présenté dans l'ouvrage de Bernard Lebeau "Généalogie de la famille de Châteaubriand" donne un aperçu très fouillé des alliances entre familles nobles durant près de neuf siècles, et ce sur vingt six générations. Ecuyers, chevaliers, seigneurs, tous sont des personnes nobles de haut rang sous l'Ancien Régime. François René de Châteaubriand était vicomte; son père comte de Combourg.

Les uns ont exercé leurs fonctions au sein du Conseil d'Etat, les autres au sein de la justice ou du Domaine royal: comme conseiller du roi, Benjamin de Ravenel du Boisteilleul (n°14), président au présidial de Quimper, Claude du Disquay (n°50), sénéchal au présidial de Qimper, conseiller au Parlement de Bretagne, président des enquêtes, Claude Visdelou (n°54), avocat au présidail d'Alençon, procureur fiscal et général des Eaux-et-Forêts du comté de Laval, Annibal de Farcy (n°60).

Tenus envers le roi au service militaire, l'un, entre autres, fut capitaine d'une compagnie de cavalerie de gentilshommes de l'arrière-ban de l'évêché de Saint-Brieuc, Mathurin de Bédée (n°24), l'autre gendarme puis capitaine commandant une compagnie, Charles de Farcy (n°30).

Quant au père de l'écrivain, René Auguste de Châteaubriand (n°2), il fut terre-neuvier volontaire, enseigne, lieutenant, puis capitaine, avant de se faire armateur à Saint-Malo. François René, lui évolua dans le milieu déplomatique et politique, prenant parti plus souvent dans l'opposition au risque de tout perdre, même la vie.

 

Bibliographie:

"Généalogie de la famille de Chateaubriand - Ascendance sur 26 générations" de Bernard Lebeau. Rennes - Octobre 1998. Chez L'auteur 14 allée du Danemark 35200 Rennes 85 francs + 15 francs de frais d'envoi.