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GéMagazine n°281 : Simone Veil

Juillet 2008

« Citoyenne de l’Europe »

L’autobiographie de Simone Veil, « Une vie », parue aux éditions Stock en 2007 est dédiée à ses chers disparus, sa mère Yvonne morte à Bergen-Belsen, à son père André et son frère Jean « assassinés en Lituanie », à sa sœur Milou et à son fils Nicolas, et à sa famille élargie [« ma famille, celle que j’ai construite avec Antoine. Je songe à nos enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants »]. Magistrat, femme politique devenue ministre de la santé et de la famille, Simone Veil a adhéré au projet européen, a participé activement au processus de la construction européenne et fut élue présidente de l’Assemblée des communautés européennes (1979-1982).

 

Une enfance à Nice dans une famille de six membres, le père, la mère, trois filles et un fils.

Le père, André Jacob (n° 2), s’est installé à Nice au lendemain de la Guerre 1914-1918, plus précisément entre juin 1924 et novembre 1925. Les deux filles aînées, Madeleine dite Milou et Denise, sont nées à Paris en 1923 et 1924, les petits derniers, Jean et Simone ont vu le jour à Nice en 1925 et 1927.

Arrêtée avec sa famille par l’occupant comme juive fin mars 1944, ils furent tous déportés – Simone, Madeleine et leur mère à Auschwitz, puis à Bergen-Belsen, Denise à Ravensbrück, Jean et son père sont partis de Drancy le 15 mai 1944 pour Kaunas en Lithuanie.

De retour en France le 23 mai 1945, la famille amputée, la vie a repris son cours : en 1946, Simone a épousé Antoine Veil, en 1947, Denise a épousé Alain Vernay, et en 1949, Madeleine a épousé Pierre Jampolsky.

Le père d’Antoine Veil, Charles Veil, né à Bruxelles en 1858 et mort à Paris en 1929, était marchand de vêtements. Antoine Veil était toutefois né à Blâmont, en Meurthe-et-Moselle : « La famille de mon mari était depuis longtemps implantée à Blâmont, en Meurthe-et-Moselle, où elle possédait une usine qui fabriquait des textiles de coton. »

Du mariage d’Antoine Veil et de Simone Jacob sont né trois enfants : « mariés à l’automne 1946. J’avais dix-neuf ans, et Antoine vingt. Notre premier fils, Jean, est né à la fin de 1947. Nicolas, le deuxième, treize mois après. Pierre-François, lui, s’est fait plus attendre puisqu’il est né en 1954. »

 

Les Jacob et les Worms, à proximité de Metz.

Simone Veil écrit « Du côté de mon père, l’arbre généalogique fait état d’une installation en France qui remonte au moins à la première moitié du XVIIIè siècle. Mes ancêtres étaient à l’époque fixés en Lorraine, à proximité de Metz ». En effet, son arrière-grand-père paternel, Jacques Jacob (n° 8) est né le 4 avril 1814 à Bionville-sur-Nied, en Moselle, d’Abraham-Salomon Jacob (n° 16), marchand boucher, et de Madeleine Landau (n° 17).  

Jacques Jacob (n° 8) s’est allié avec Minette Worms (n° 9), née le 15 février 1823 à Dijon, en côte d’Or. Il semble que le couple Jacob-Worms se soit installé à Reims, dans la Marne : Edmond Jacob (n° 4) y est né le 7 février 1852 et Jacques Jacob (n° 8) y est décédé le 27 octobre 1882 ; plusieurs enfants du couple Jacob-Worms y ont vu le jour : Mathilde Jacob le 4 février 1849, Arthur Jacob, le 13 août 1850, Léon Jacob, le 26 octobre 1853. Quelques années plus tard, la famille est à Paris : Edmond Jacob (n° 4) y épouse le 24 décembre 1888 Mathilde Schnerb (n° 5), André Jacob (n° 2) y né le 31 janvier 1891, son frère, Pierre Simon Jacob, le 19 octobre 1892.

« Avant même la guerre de 1870, mes ancêtres paternels avaient gagné Paris, où ils s’installèrent comme artisans » , la famille était encore à Reims en 1869 (mariage de Mathilde Jacob le 8 mars 1869 avec Abraham Worms, frère de Minette Worms (n° 9) et le 27 octobre 1882 on y enregistre le décès de Jacques Jacob (n° 8).

Si Minette Worms (n° 9) est native de Dijon où son père était alors « chantre de la synagogue », son frère, Abraham Worms, est né le 11 octobre 1831 à Metz. Leurs parents, Elias Worms (n° 18) est né à Pontpierre, en Moselle, le 12 novembre 1777, et Esther Lambert (n° 19) est née à Metz le 24 février 1790. Elias Worms et Esther Lambert sont tous deux décédés à Mets, respectivement, le 17 juillet 1861 et le 10 juillet 1850.

 

Les Steinmetz à Coblence, en Allemagne, en 1848.

 « Avant même la guerre de 1870, mes ancêtres paternels avaient gagné Paris, où ils s’installèrent comme artisans. Ils fabriquaient des petites boîtes en argent ». En fait, Edmond Jacob (n° 4) est qualifié de caissier (« Mon grand-père occupait un poste de comptable à la Compagnie parisienne du gaz »), son père, Jacques Jacob (n° 8), marchand de moutons, puis marchand d’immeubles, et Abraham-Salomon Jacob (n° 16), marchand boucher. Par contre, Jonas Steinmetz (n° 6) est qualifié fabricant de bijouterie, puis fourreur ; il semble donc que la fabrication des petites boîtes en argent ait été assurée par le grand-père maternel. « Ils étaient originaires de Rhénanie, ma grand-mère de Belgique, et s’étaient établis en France à la fin du XIXè siècle. » Jonas Steinmetz (n° 6) est né le 5 avril 1855 à Paris (5ème arrondissement ancien) de Moses Steinmetz (n° 12), marchand, de café, et de Henriette Schweich (n° 13). Le couple Steinmetz-Schweich était donc à Paris dès le milieu du XIXè siècle. Toutefois leur mariage fut célébré le 9 octobre 1848 à Coblence, en Allemagne. En effet, Henriette Schweich (n° 13), fille de Jonas Schweich (n° 26) et de Gertrude Morel (n° 27), est native de Neuwied, en Allemagne, toutefois elle est décédée le 4 avril 1893 à Paris 10ème.

Si Jonas Steinmetz (n° 6) s’allia à Saint-Josse-ten-Noode, en Belgique, le 3 novembre 1884, c’est parce que sa promise, Alice Weyll était native de Belgique, précisément elle est née le 5 août 1863 à Bruxelles. Bruxelles ville où réside la famille Camille Weyll (n° 14), négociant, et Célestine Stein (n° 15). L’un et l’autre sont nés à Bruxelles, le premier, le 29 octobre 1840 de Samuel Weyll (n° 28) et d’Emma Picard (n° 29), la seconde, le 21 juillet 1843 de Lob Stein (n° 30) et de Nanet Philips (n° 31). Leur mariage y fut célébré le 20 juillet 1862.

 

Les Philips de Bavière installés à Bruxelles en 1789.

En 1808, figure sur la liste de fixation de nom des Juifs de Bruxelles la famille de Salomon Philips (n° 62). Salomon Philips est né vers 1759 à Hesse Darmstadt en Bavière. Il est arrivé à Bruxelles en 1789. Son épouse Sara Deval (n° 63) est née vers 1775 à Eindoven, en Belgique. Quatre enfants vivent avec le couple en 1808 : Pétronille Philips née à Bruxelles le 26 octobre 1800 ; Aron Philips né à Bruxelles le 30 juin 1804 ; Mayer Philips né à Bruxelles le 24 mars 1806 ; et Nanet Philips (n° 31), dentellière, née à Bruxelles le 30 novembre 1807. Le couple a eu d’autres enfants : Mathieu Philips, brocanteur, né à Bruxelles dans les années 1794, disparu le 20 mars 1815 ; Salomon Philips né vers 1796 à Russel en Hollande ; Lion Salomon Philips né à Bruxelles le 30 Messidor an VI (juillet 1798), décédé en 1800 sous le nom de Lion Salomon ; Gabriel Philips natif de Bruxelles, décédé à Bruxelles le 6 mai 1826 ; Mayer Salomon Philips né à Bruxelles le 4 Ventôse an II (mars 1803) ; Aaron Philips né à Bruxelles le 20 Messidor an 13 (juillet 1805), vivant en 1848 ; Bernard Philips né à Bruxelles le 14 avril 1810 ; Daniel Philips né à Bruxelles le 9 septembre 1812 ; Caroline Philips née à Bruxelles le 21 août 1815 ; Jeanne Philips sœur jumelle de la précédente ; Michael Philips né à Bruxelles en Octobre 1829, décédé en décembre suivant.

Salomon Philips (n° 62) est le fils de Meyer Philips (n° 124) et de Elalie Salomon (n° 125). Instituteur et boucher pour la communauté juive, il est décédé le 17 avril 1836 à Bruxelles. Nanet Philips (n° 31), né en 1807, sa fille, est décédée le 28 février 1892 à Bruxelles ; elle avait épousé le 31 juillet 1839 à Bruxelles Lob alias Léopold Stein (n° 30) né le 4 janvier 1810 à Schwelheim, fils de Abraham Stein (n° 60) et de Judith Levi (n° 61), raccomodeur de porcelaine et marchand d’antiquités.

La descendance Philips s’est poursuivie comme suit : Aron Philips né le 30 juin 1804 voyageur de commerce et décédé le 30 janvier 1864 à Bruxelles sous le nom de Aron Meyer ; Mayer Philips né le 24 mars 1806 a épousé le 27 avril 1836 à Bruxelles Ester Lazarus fille d’Elias Lazarus arrivé de Bohême, et de Rose Moyse, née à Bruxelles le 2 Floréal an XIII (avril 1805), fileuse de coton ; Bernard Philips né à Bruxelles le 14 avril 1810 a épousé le 28 avril 1847 à Bruxelles Rose Levi Jacobson fille d’Isaac Jacobson et de Régine David, née le 1er novembre 1817 à Hockheim (Nassau), femme de chambre ; Daniel Philips né à Bruxelles le 9 septembre 1812, fabricant de brosses, marié à Bruxelles le 12 novembre 1845 avec Sophia Riex né à Gent le 6 Fructidor an 12 fille de Simon Emmanuel Riex et de Ranke Moses ; Caroline Philips née à Bruxelles le 21 août 1815, mariée à Bruxelles le 21 mars 1849 avec Isaac Levy né au Luxembourg le 9 septembre 1817, gantier.

 

Simone Veil est européenne par sa famille, par son histoire, par son parcours. Rescapée, elle nous souffle que « la Shoah est « notre » mémoire et « votre » héritage » et « qu’à nos côtés, tous ces morts qui nous sont si chers, connus et inconnus, se tiennent en silence ».

 

Bibliographie :

« Une vie » de Simone Veil. Editions Stock, décembre 2007.

« A la découverte de leurs racines – Généalogies de 85 célébrités – Première série » de Joseph Valynseele et Denis Grando. ICC février 1988.

« Les listes de fixation de nom en Belgique en 1808 et 1826 et autres renseignements concernant le 18ème et le début du 19ème siècle ». GenAmi. Association de Généalogie Juive Internationale, 1998.

« Les Juifs de Bruxelles avant l’Indépendance de la Belgique » par Claude Geudevert. GenAmi. Association de Généalogie Juive Internationale, 1998.