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GéMagazine n°274 : Raymond Barre

Octobre 2007

Economiste et homme politique

Né le 12 avril 1924 à Saint-Denis de La Réunion, dans une maison appelée la villa Déramond-Barre, Raymond Octave Joseph Barre est décédé le 25 août dernier à l’âge de 83 ans.

Economiste reconnu, il a débuté sa carrière comme professeur. Entré en politique, il fut ministre du Commerce extérieur de mars 1976 jusqu’à sa nomination simultanée comme Premier ministre et ministre de l’Economie et des Finances. Il occupa le poste de Premier ministre jusqu’à l’élection présidentielle de 1981. Candidat à la Présidence en 1988, il a échoué au premier tour. Raymond Barre fut maire de Lyon de juin 1995 à 2001.

 

La Réunion et le métissage.

Raymond Barre est descendant d’aventuriers, de colons, d’immigrants et d’esclaves, en somme des familles qui ont peuplé l’île Bourbon et qui ont fait la Réunion ; il est issu d’un métissage qui fait la particularité de la Réunion. Ces hommes étaient aventuriers débarqués de France des bateaux de la Compagnie des Indes orientales, colons venus de France (Basse-Normandie, Bourgogne, Nord-Pas-de-Calais, île de France, Rhône-Alpes, Centre, Bretagne, Poitou-Charentes, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Aquitaine, Midi-Pyrénées, Corse), femmes sorties de la Salpêtrière à Paris ou choisies pour donner la vie, immigrants arrivant d’Europe (Belgique, Allemagne, Italie, etc.), d’Amérique, du Moyen Orient, d’Asie (Inde), d’Afrique ou de l’Océan indien (Madagascar, Ile Maurice), esclaves, ou encore issus des « dynasties du sucre » qui pointent à partir de 1815.

 

De la Drôme, région qui a soutenu la Réforme.

Dans le département de la Drôme, région qui a soutenu la Réforme, certaines familles protestantes s’appelaient Barre et Breynat mais aucune parenté entre ces familles n’a été prouvée à ce jour. La filiation Barre est connue sur six générations jusqu’à Charles François Barre (n° 32) époux de Marie Breynat (n° 33). Leur fils, Jean François Barre (n° 16), est né à Charpey, dans la Drôme, le 12 juin 1766. Bien qu’il ait épousé une fille de Coniers, dans l’Isère, Henriette Rubichon (n° 17), le couple a vécu à Charpey où ils sont décédés l’un, le 9 mars 1853, l’autre, le 22 octobre 1855. Leur fils, René Florentin Xavier Barre (n° 8), pharmacien, avait déjà rejoint La Réunion, plus précisément Saint-Pierre, où il s’était marié en 1845. La famille Barre s’est installée à Saint-Denis avec Antoine Joseph Xavier Barre (n° 4), Saint-Denis où vont naître René Barre (n° 2), puis Raymond Barre.

Raymond Barre eut deux sœurs, Anne-Marie mariée à Maurice Bert, et Marguerite Marie alliée à Jean Claude Lincoln. Le couple Barre-Murat eut cinq enfants : 1° L’aîné René Barre (n° 2), père de Raymond ; 2° Emmanuel Barre (1900-1983) dont postérité d’un premier mariage ; 3° Marie Thérèse Barre (1902-1984) épouse de Loïs Paris-Leclerc ; 4° Henri Barre (1905-1970) dont postérité ; et 5° Pierre Barre (1909-1961) dont descendance.

Le grand-père paternel, Antoine Joseph Xavier Barre (n° 4), avait trois frères et trois sœurs : 1° Adèle Emma Barre épouse Barquisseau ; 2° Charles Victor Barre ; 3° Antoine Félix Barre ; 4° Antonia Zélie Barre, épouse Adam de Villiers ; 5° Eugénie Antonia Léonie Barre femme Boyer de La Giroday ; et 5° Joseph Antony Barre.

Charlotte Déramond (n° 3) est morte à 101 ans en 2002 ; elle est la sœur aînée d’une fratrie de quatre, Roger Déramond né en 1903, Germaine Déramond née en 1907, et Marie Antoinette dite Marinette Déramond née en 1910.

 

Les Murat arrivent à La réunion en 1802.

Jean-François Murat (n° 40), capitaine de marine marchande embarqué sur le « Courrier de l’Isle de France » est arrivé à l’île Maurice le 17 juillet 1802. De son épouse, Pélagie Louise Fourchon (n° 41), il eut au moins un fils, Jean François Théodore Murat (n° 20) qui vit le jour le 15 juin 1800 (ou le 26 Prairial an VIII selon le calendrier républicain) à Villefranche-de-Rouergue. Ce dernier est arrivé à la Réunion en 1820, s’est installé à Saint-Paul où il est qualifié en 1837 « avoué ».

Le 3 juin 1840, Jean François Théodore Murat (n° 20), épouse à Saint-Paul Augustine Caffin de Bellegarde (n° 21) fille de Charles Etienne Caffin de Bellegarde (n° 42) et de Marie Marguerite Anasthasie Mahé (n° 43). Charles Etienne Caffin de Bellegarde (n° 42) est né le 8 novembre 1780 à Saint-Louis de Versailles (Yvelines) de André Caffin de Bellegarde (n° 84), commis des Finances, et de Angélique Boucher (n° 85). Cité comme « commerçant » à Saint-Paul en 1806, il y épouse le 1er mars 1809 Julie Cardel (n° 43). Le fonds de la famille Caffin, seigneurs de Bellegarde, est aujourd’hui consultable aux archives du Val-d’Oise.

Du couple Murat-Caffin de Bellegarde vont naître au moins cinq enfants dont trois fils : 1° Joseph Henri Murat né le 26 juin 1841 à Saint-Paul, ordonné prêtre, décédé le 27 septembre 1913 ; 2° Charles Etienne Théodore Murat qui va suivre ; 3° François Augustin Eugène Murat né le 23 juin 1846, missionnaire dans la Compagnie de Jésus, décédé en 1925.

Charles Etienne Théodore Murat (n° 10), procureur de la République, puis président de la Cour d’appel de Saint-Denis, a épousé Marie Antoinette Troussail (n° 11) née en 1842 à Saint-Paul qui descend par Philibert Troussail (n° 22) de Antoine Troussail (n° 44), chirurgien major, né vers 1755 à Ponson, dans les Pyrénées-Atlantiques, arrivé sur l’île en septembre 1782, lui-même fils d’un maître chirurgien de Pau, Jean Troussail (n° 88), et de Marie Baroy (n° 89), qui épousa le 10 mai 1790 à Saint-Paul Françoise Euphrasie Augustine Lelièvre (1769-1823), d’où onze enfants. La sœur de François Euphrasie Augustine Lelièvre (n° 45), Esther est plus connue sous le nom d’Eléonore, la muse du poète Evarisre de Parny.

 

Les familles qui ont peuplé l’île Bourbon.

On aborde les anciennes familles qui ont peuplé l’île Bourbon par l’arrière-grand-mère paternelle, Nathalie Antoinette Rose (n° 9). En effet, la mère de celle-ci, Marguerite Chérie Prugnières (n° 19) eut elle-même pour mère, Anne Florine Solitaire Adam Jams (n° 39), qui descend des Jams originaires d’Ostende en Belgique, mais aussi des Hoarau, l’une des plus prolifiques familles de île, et du couple Claude Ruelle (n° 314 et 458) et Monique Caron (n° 315 et 459), couple rescapé du massacre de Fort-Dauphin à Madagascar. Tout ceci établit une parenté avec certaines familles de l’ascendance maternelle de Raymond Barre.

Du côté maternel, on rencontre dans l’ascendance de Raymond Barre, principalement à partir de Marie Amandine Elisabeth Martin (n° 7) un grand nombre d’individus arrivés sur l’île Bourbon au 17ème siècle, corsaires, flibustiers, aventuriers et femmes envoyées pour se marier avec les célibataires de l’île.

Certains d’entre eux figurent dans l’ouvrage « Les cinq cents premiers réunionnais », comme par exemple Pierre Martin (n° 448), Antoine Maunier (n° 452), Henri Grimaud dit « Morel » (n° 456), Pierre Nativel (n° 460), Louis Caron dit « La Pie » (n° 630 et 918), Jean Gruchet (n° 906), François Rivière (n° 908), Henry Mussard (n° 910), Athanase Touchard (n° 914), Henri Gilbert Wilman (n° 984), Jean Bellon (n° 1814) et François Mussard (n° 1820)

 

Henri Grimaud, corsaire, flibustier, pirate ?

Chacun de ses aventuriers des temps anciens a une histoire et quelle histoire ! Ainsi Henri Grimaud dit « Morel » (n° 456) est dit « fils incestueux de Benjamin Grimaud et de sa sœur Marie Grimaud » dans le « Dictionnaire du peuplement » paru en 1994. Il est originaire de Blois et débarque ou « fut débarqué » dans les années 1695-1696 à Saint-Paul – Il est en effet nommé dans divers textes comme faisant partie des « 70 pirates débarqués par le capitaine Henry Every dont certains ont fait souche à la Réunion », au même titre que Victor Riverain, ascendant n° 990. Son butin lui aurait permis d’acquérir le 28 août 1696 une « maison meublée, un magasin et quatre cases à l’Etang de Saint-Paul ». En septembre qui suit, il épouse Marie Touchard (n° 497), fille de Athanase Touchard (n° 914), originaire d’Issy-les-Moulineaux en île de France, et de Elisabeth Houve (n° 915), née à Madagascar. De ce mariage sont issus au moins quatre enfants : Marianne Grimaud née et décédée en 1697 ; Henry Grimaud né en 1698 ; Marie Grimaud née en 1700 ; et Jean Baptiste Grimaud (n° 228).

Henri Grimaud dit « Morel » (n° 456) a bien réussi. Commandant d’une des deux compagnies de milice de Bourbon, puis Capitaine du quartier Saint-Paul, il a obtenu une vaste concession à l’Ermitage. Il meurt lors du voyage qui le ramène avec sa famille en France en 1702 à Calicut, aux Indes. Veuve avec trois jeunes enfants, Marie Touchard rentre à Saint-Paul. Elle mettra au monde un enfant naturel le 3 septembre 1709, Antoine Touchard (1709-1791), né des « œuvres de Antoine Boucher » né en 1779 qui épousa en 1710 à Port-Louis Renée Le Gourzonc et fut de 1710 à 1715 plus tard « major des gardes côtes en garnison à Groix (Morbihan) ». Marie Touchard épousa en secondes noces le 11 février 1716 à Saint-Paul, François Lautret (1682-1744).

 

Henry Gilbert Wilman, Jean Gruchet, et les autres.

Henri Gilbert Wilman (n° 984) voyageait sur les bateaux de la Compagnie hollandaise des Indes. Un temps flibustier sur un forban anglais, il débarqua à Bourbon en janvier 1687 où il a épousé en 1689 Jeanne Royer dont neuf enfants.

Jean Gruchet (n° 906), quant à lui est normand ; il fut envoyé par la Compagnie comme armurier ; il s’installe à Saint-Denis puis à Saint-Paul où il épouse Jeanne Bellon dont onze enfants. Veuf le 30 mai 1729, Jacquette Levêque devint sa seconde épouse et lui a donné cinq enfants.

Louis Caron dit « La Pie » apparaît par deux fois dans l’ascendance de Raymond Barre. Il porte les numéros 630 et 918. Il est originaire de Basse-Bretagne et est arrivé à Bourbon le 27 avril 1671. Arrivé comme soldat, il continue à l’être auprès du Gouverneur de l’île. Il a obtenu une concession le 20 janvier 1690 à Saint-Paul et est devenu membre du Directoire de Saint-Paul comme l’un « des six plus anciens habitants de Bourbon ». Athanase Touchard (n° 914) fut lui aussi membre du Directoire de Saint-Paul, colon agriculteur , il fut aussi « Prieur de la Congrégation du Mont-Carmel créée en 1688 ». Bien sûr, chaque personnage de cette ascendance mérite attention, de par ses origines, de par ses motivations, de par ses aventures, de par sa réussite ou sa faillite, pour en connaître un peu plus sur les « premiers Réunionnais », une référence, le « Dictionnaire du peuplement ».

 

Rescapés du « massacre de Fort-Dauphin » à Madagascar.

Le « massacre de Fort-Dauphin », fort fondé en 1643 à Madagascar, se déroula en 1674 et fut perpétré par la tribu des Tanosy. Après le massacre de nombreux colons, les survivants réfugiés dans le fort attendirent des renforts jusqu’à l’arrivée du navire « Blanc Pignon ».

Les rescapés sont en petit nombre. Ils embarquent sur le « Blanc Pignon » et certains d’entre eux vont mourir pendant la traversée. Débarquent à Bourbon que quelques individus « rescapés du massacre de Fort-Dauphin », dont Pierre Martin (n° 448), né vers 1634 à Mouchan (Gers), maître tailleur, qui avait épousé juste avant le massacre à Fort-Dauphin Nicole Coulon (n° 449) dont il eut huit enfants. Nicole Coulon était sortie de la Salpêtrière à Paris et avait été envoyée à Bourbon pour se marier. Elle est une des deux jeunes femmes qui a atteint bon port. Avant de s’installer à Bourbon, Athanase Touchard (n° 914) était colon à Madagascar, il a vécu les événements de 1674 et s’en est lui aussi sorti.

 

La Grande épidémie de Variole de 1729.

Des dizaines de membres de chaque famille de l’île Bourbon sont mortes lors de la grande épidémie de variole de 1729, première épidémie qu’ait connu La réunion. Celle-ci a d’abord touché Saint-Denis puis est passée à Sainte-Suzanne et à Saint-Paul, quartier qui a enregistré plus de 800 décès.

On ne compte pas moins de dix personnes identifiées dans l’ascendance de Raymond Barre décédées lors de cette épidémie : le 25 avril, Etienne Hoarau (n° 632), le 17 mai, Guillaume Hoarau (n° 316), le 28 mai, Thérèse Héros (n° 909), le 30 mai, Jeanne Bellon (n° 907), le 8 juin, Marguerite Mollet (n° 911), le 12 juin, Françoise Ruelle (n° 157), le 15 juin, Jacques Lauret (n° 462), le 21 juin, Jeanne Mussard (n° 455), le 7 juillet, Monique Caron (n° 315 et 459), le 8 juillet, Claude Ruelle (n° 314 et 458), et le 3 août, Elisabeth Houve (n° 915). Dans « Le P’tit crayon des îles », il est fait état de la mise à jour de squelettes par le cyclone Gamede. Ce cimetière pourrait dater du début du 18ème siècle et aurait donc été créé pour les innombrables victimes de cette épidémie. Un paragraphe intitulé « Plusieurs familles décimées » permet de confirmer l’identité de certaines victimes « De la famille Bellon à Marguerite Touchard, en passant par Etienne et Jean Hoarau, la famille Mollet ou encore les Fontaine et les Héros… la liste des victimes de l’épidémie de Variole dont dispose Alexis Miranville semble longue ».

 

Sources :

http://cgb-reunion.org/histoire/

http://groups.msn.com/espace974/b.msnw

http://www.amicale-genealogie.org/arbres

 

Bibliographie :

« A la découverte de leurs racines » de Joseph Valynseele et Denis Grando. ICC, 1988.

« Histoire familiale des hommes politiques français ». Editions Archives&Culture (1997).

« Dictionnaire généalogique des familles de l’île Bourbon »  de Camille Ricquebourg. 1976-1983.

« L’épopée des cinq cents premiers Réunionnais - Dictionnaire du peuplement (1663-1713) ». De Jules Bénard et Bernard Monge, Editions Azalées (1994).

« Les origines des familles Murat de l’île Bourbon » de Georges Murat. Paris 1986.

« L’autre Murat », Journal de l’Ile de la Réunion (article mis en ligne le 7 août 2006 : http://www.clicanoo.com)

« Le mystère des squelettes résolu », article dans « Le P’tit crayon des îles » du 17 mai 2007.