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GéMagazine n°269 : Jean Anouilh

Avril 2007

Dramaturge - (1910-1987)

Il y a trente ans s’éteignait l’auteur d’Antigone. Sa première pièce « Hermine » fut jouée en 1932, son premier grand succès « Le voyageur sans bagages » en 1937, mais c’est la représentation de sa pièce « La Sauvage » qui a confirmé sa notoriété. Pendant l’occupation, Jean Anouilh s’est tourné vers l’adaptation de tragédies grecques ; c’est en 1944 que fut créé « Antigone » qui engendra un succès retentissant. Il écrivit encore plusieurs pièces, fit de la mise en scène, bâtissant une œuvre dépeignant des combats passionnés.

 

Les origines géographiques.

Les origines géographiques des huit quartiers de l’ascendance de Jean Anouilh sont réparties sur quatre régions : Région Midi-Pyrénées pour 25% d’entre eux, Région Auvergne pour 12,5%, Région Aquitaine pour 37,5%, et Région Poitou-Charentes pour les 25% restants.

Le patronyme Anouilh est très répandu en Ariège, particulièrement dans le Couserans ; ce territoire situé autour de Saint-Girons, est divisé en Bas-Couserans et Haut-Couserans et est arrosé par le salat qui se jette dans la Garonne. Anouilh est un nom occitan qui signifie un agneau. Le patronyme Pailhes que l’on rencontre écrit aussi Pailhé  ou Paillé est localisé dans le sud-ouest de la France. Quant aux patronymes Dassé et Dumercq, ils sont principalement portés dans les Landes, tandis que les patronymes Naud et Alliot sont fréquents dans les Charentes, en Vendée, dans le Maine-et-Loire et la Loire-Atlantique. Ces éléments confirment bien l’ascendance de Jean Anouilh ; ses ancêtres ont des origines concentrées sur la façade atlantique, à l’exception du patronyme Trin que l’on a situé dans le Cantal.

 

« Ma vie privée est mon affaire personnelle ».

Discret sur son histoire personnelle, Jean Anouilh disait que sa vie privée était son affaire personnelle, pourtant Joseph Valynseele et Denis Grando se sont penchés sur ses racines. Né à Bordeaux, d’un père tailleur et d’une mère violoniste installés dans la capitale dans les années 1920, il a suivi ses études à Paris, au collège Chaptal. Attiré par la publicité, il y rencontra Jacques Prévert. Emerveillé par le théâtre, il deviendra le secrétaire de Louis Jouvet.

Dans sa 43ème année, il a épousé à Worthing, en Grande-Bretagne, Nicole Lançon, artiste sous le nom de Charlotte Chardon. Si Nicole Lançon a mis en scène certaines pièces de son mari, elle lui a aussi donné deux filles, Caroline et Marie-Colombe, et un garçon, Nicolas. Jean Anouilh eut aussi deux autres enfants, Catherine, née de Thérésa Denorme (1905-1979), actrice et romancière sous le pseudonyme de Monelle Valentin, et une autre fille prénommée Anouk d’Ursula Wetzel.

 

Jean Anouilh en famille à Paris.

Toute la famille Anouilh a quitté Bordeaux pour Paris en 1918 ; ils se sont installés rue de La Chapelle à Paris 18ème. Gaston Anouilh (n° 2) est marchand tailleur, son épouse, Marie Magdeleine Soulue (n° 3) est violoniste. Elle est musicienne comme l’était son beau-frère, Lucien Anouilh, artiste musicien, qui reçut le 1er prix de violon du conservatoire de Bordeaux, et qui fut 1er violon solo au grand théâtre de la dite ville. Celui-ci était né à Bordeaux le 5 octobre 1879. Julien Anouilh est « professeur de musique » à son mariage célébré le 28 février 1905 à Bordeaux avec Renée Gaudin fille d’un banquier, Achille Marcelin Gaudin et de Marie Geinguenaud.

Jean Anouilh avait une sœur aînée, Marie Geneviève Anouilh née à Bordeaux le 1er mai 1902 qui s’est alliée en 1930 à Colombes (Hauts-de-Seine) avec Charles Canu, négociant en voitures, dont une fille Caroline.

 

Les quatre sœurs Soulue.

Pierre Soulue (n° 6) et Marie Blanche Naud (n° 7) ont eu quatre filles toutes nées à Bordeaux : 1° l’aînée, Marie Magdeleine Soulue (n° 3), la mère de Jean Anouilh, qui vit le jour une année après le mariage de ses parents ; 2° Germaine Soulue née le 22 avril 1881, morte prématurément à 13 ans le 30 avril 1894 à Caudéran (Gironde) ; 3° Odette Soulue née le 7 janvier 1887 ; et 4° Yvonne Soulue née le 15 août 1894.

Odette et Yvonne Soulue se sont remariées après avoir perdu leurs époux respectifs lors de la Guerre 1914-1918. La première a épousé en secondes noces le 10 décembre 1918 René Cousy (1898-1977), négociant à Bordeaux, fils de Jean Cousy, négociant en vins, et de Marie Dupont. De ce mariage sont nées deux filles, Reine et Jacqueline. La seconde s’est remariée le 8 septembre 1921 Alcide Sigrist (1893-1965), ingénieur, fils de Jean Sigrist, ajusteur, et de Marie Salenave, dont une fille unique, Christiane.

 

Deux beaux-frères « Morts pour la France ».

Les deux beaux-frères de Marie Magdeleine Soulue (n°3) ont été « tués à l’ennemi ». Bernard Marie Joseph Cluzan, docteur en droit dans le civil, caporal fourrier au 37ème régiment d’Infanterie coloniale, de la classe 1907, recruté à Bordeaux, fut tué le 28 février 1915 à La Chapelotte, dans le département des Vosges. Il était né le 29 mai 1887 à Villandraut, en Gironde, de Firmin Antoine Cluzan, géomètre, et de Marguerite Lacroix. Il laissait une veuve et une petite fille, Josette Cluzan, âgée de quelques mois.

Adolphe Albert Antoni, aspirant au notariat, fut recruté à Mende (Lozère) en 1908. Il fut tué à l’ennemi, à peine cinq mois après son mariage, le 23 août 1914 à Jamoigne, en Belgique. Il était né le 18 octobre 1888 à Paris 6ème, de Albert Antoni, marchand boucher, et de Lydie Léonie Combrous. Son décès fut constaté par un jugement rendu par le tribunal de Bordeaux le 5 octobre 1920 et l’acte fut transcrit le 30 octobre suivant.

 

Les Anouilh de Cérizols, en pleine « guerre des demoiselles ».

Les Anouilh, Pailhes, Touffine et Géreaux vivent à Cérizols, en Ariège. Pierre Anouilh (n° 8), y est né le 10 octobre 1799, Marie Touffine (n° 9),le 28 septembre 1799. L’un et l’autre s’y sont épousés le 30 mars 1823. Cérizols est la ville où sont décédés les parents des futurs, entre 1830 et 1839 ; Pierre Anouilh et Marie Touffine, qui y cultivaient la terre, y sont eux-mêmes morts, lui le 16 septembre 1855, elle, le 12 octobre 1854. La région a vécu intensément de 1829 à 1832, puis plus sporadiquement jusqu’en 1872, un soulèvement populaire appelée « la guerre des demoiselles ». Les paysans révoltés sont nommés « demoiselles » parce qu’ils étaient masqués et plus au moins déguisés en femme.

La promulgation du Code forestier voté le 27 mai 1827 qui réglemente l’usage des forêts est à l’origine de cette révolte. Cette nouvelle réglementation concerne le ramassage du bois, les coupes et le pâturage. Ces interdictions remettent en question des espaces utilisés depuis des siècles par tous quel qu’en soit les propriétaires. Le nombre grandissant de verbalisations a déclenché une « guerilla » qui a touché entre autre le Couserans, réactions spontanées des paysans contre les gardes forestiers, les charbonniers et les gendarmes. Julien Anouilh (n° 4) préférera s’installer à Bordeaux où il va épouser le 3 janvier 1874 une bordelaise, Marie Trin (n° 5), dont le père, Jean Trin (n° 10) est natif du Cantal, et la mère, Elisabeth Dassé (n° 11), des Landes.

 

La mobilité sociale.

Gaston Anouilh (n° 2) et Marie Magdeleine Soulue (n° 3) se sont peut-être rencontrés parce que leurs pères respectifs étaient tailleurs, Julien Anouilh (n° 4), marchand tailleur, Pierre Soulue (n° 6), tailleur d’habits. Leur rencontre est peut-être due au fait que le frère de Gaston, autre Julien Anouilh pratiquait la musique comme Marie Magdeleine.

Des laboureurs, des cultivateurs, des journaliers sont au nombre des ancêtres de Jean Anouilh comme pour la majorité d’entre nous. On relève aussi quelques artisans, deux maçons, Joseph Anouilh (n° 16) et Antoine Naud (n° 28), deux charpentiers, Joseph Anouilh (n° 16) et Jacques Genêt (n° 58), deux marchands tailleurs, Gaston et Julien Anouilh (n° 2 et 4), un tailleur d’habits, Pierre Soulue (n° 6) et un serger, Jacques Michelet (n° 30). Elisabeth Dassé (n° 11), sage-femme à Bordeaux, vit avec son mari cordonnier à Jean Trin (n° 10).

On découvre toutefois à la 6ème génération, un huissier aux contributions à Saint-Simon-de-Pellouaille, en Charente-Maritime, Jean Paul Alliot (n° 62), dont la petite-fille, Virginie Michelet (n° 15) a épousé un capitaine de l’octroi à Bordeaux, Jacques Paulin Naud (n° 14). Jean Anouilh, élevé dans un milieu artistique puisque sa mère était musicienne, a abordé le théâtre par l’écriture ; ses filles seront directrice de société, décoratrice, journaliste et actrice, son garçon, cinéaste.

 

Sources :

« A la découverte de leurs racines » de Joseph Valynseele et Denis Grando. ICC. 1994.